Racisme 2
“Le mot racisme, en effet, est trompeur: il réunit sous un label unique deux comportements dont la genèse, la logique et les motivations sont complètement dissemblables. Le premier situe sur une même échelle de valeurs l’ensemble des nations qui peuplent la terre; le second proclame l’incommensurabilité des manières d’être; le premier hiérarchise les mentalités, le second pulvérise l’unité du genre humain; le premier convertit toute différence en infériorité, le second affirme le caractère absolu, indépassable, inconvertible des différences; le premier classe, le second sépare; pour le premier, on ne peut pas être persan, aux yeux du second, l’on ne peut pas être homme, car il n’y a pas entre Persan et l’Européen de commune mesure humaine; le premier déclare que la civilisation est une, le seconde que les ethnies sont multiples et incomparables. Si le colonialisme est bien l’aboutissement du premier, le second culmine dans l’hitlérisme. …
Sans doute le concept de race a-t-il été ruiné par les travaux convergents des sciences sociales et des sciences naturelles. … l’argument biologique est désormais sans pertinence. … Cette théorie s’est effondrée. Mais où est le progrès? Comme les chantres anciens de la race, les fanatiques actuels de l’identité culturelle consignent les individus dans leur appartenance. Comme eux, ils portent les différences à l’absolu, et détruisent, au nom de la multiplicité des causalités particulières, toute communauté de nature ou de culture entre les hommes.”
aus: Alain Finkielkraut: La défaite de la pensée. Paris: Folio 1991 (Orig.-Ausg. 1987), S.106-109.
Abb.: Agus Triyanto BR: We are what we are #2, 2015, indoartnow, im Internet.
08/13